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Analyse des réalités de la célébration du centenaire et pistes pour le futur de la Polonia

Quelles pistes de travail

pour garantir l’avenir de la Polonia de France ?

On le sait bien, la période de célébration du centenaire de l’immigration massive des Polonais a mis en évidence les incertitudes pour l’avenir de la Polonia. Le foisonnement des initiatives locales, souvent limitées à la reconduction des manifestations traditionnelles (avec un petit bandeau « centenaire »), ne permet pas de masquer l’absence de projet collectif, de vision d’ensemble, de mise en perspective, d’innovation durable. Et c’est bien dommage.

Il y a près de 30 ans, dans « Les Polonais du Nord ou la mémoire des corons » (Editions Autrement. Collection « Français d’ailleurs, peuple d’ici »), Janine Ponty écrivait à la page 52 :

« L’activité associative polonaise du Nord parait vulnérable et son avenir compromis, dans la mesure où elle repose sur les épaules d’un très petit nombre de volontaires pugnaces qui, s’ils étaient contraints d’abandonner, ne trouveraient pas de successeurs. Problème propre à la survie de toute association souvent liée à la personne de son président, il présente ici un caractère d’une exceptionnelle gravité car les adolescents, même s’ils se sentent la fibre associative et l’âme généreuse, iront employer leur énergie ailleurs. Ils ne comprennent plus l’intérêt de maintenir des groupes à part, par nationalité d’origine. Les mariages mixtes qui brouillent les pistes ne sont pas seuls en cause. Des jeunes nés de deux parents d’ascendance polonaise raisonnent de même. »

Certes, cette prévision d’une grande universitaire qui a consacré la plus grande partie de sa vie à étudier l’immigration polonaise, s’est révélée prématurée et on peut s’en réjouir. Mais le problème se pose aujourd’hui avec une plus grande acuité. Il est confirmé par de nombreuses observations : - les nouvelles immigrations ne s’intéressent pas à cette vie associative traditionnelle et cherchent autre chose – les Français d’origine polonaise qui sont allés travailler en Pologne pour leurs études ou leur travail (contrats avec des entreprises) refusent de nouer des contacts, à leur retour, avec ces associations qu’ils considèrent comme ringardes – le niveau culturel des nouvelles générations, beaucoup plus élevé que celui de leurs ascendants, fait que les banquets, les messes, les fêtes, ne les intéressent pas, certains s’en moquant même durement en les qualifiant de réserves de polonais, comme les réserves d’indiens, avec des pratiques rappelant celles de leurs arrières arrières grands parents.

Les manifestations du centenaire n’ont rien fait pour changer cette image, en ignorant les possibilités de concerts, d’expositions, de conférences, de débats, etc., en négligeant la richesse de la culture polonaise sous tous ses aspects. Il faut bien dire que ce qui est proposé est très réducteur et ne peut que conforter un entre-soi qui est toujours un frein au développement. Quelques associations ont réussi à surmonter ce syndrome, en Lorraine, dans la région nantaise, en Bourgogne, en Provence peut-être (avec un festival du cinéma polonais). J’utiliserai leur expérience pour développer des pistes de pérennisation de la Polonia de France.

Quelques équipes d’amis, indépendantes des associations existantes dont ils se méfiaient à juste titre, ont réalisé de grandes choses (un musée virtuel, un site facebook régulièrement alimenté ayant rayonné en Europe et au-delà), mais elles étaient tellement vulnérables que leur avenir est compromis (pour reprendre les termes de Janine Ponty). Quelques uns de leurs responsables, épuisés et déçus, ont abandonné.

Quelques responsables d’associations, pourtant englués dans  le conservatisme, se sont inquiétés du constat. Quand ils ne se sont pas dit « après moi, le déluge », ils ont pu tenter de « recruter » des jeunes pour leur groupe folklorique, voire, exceptionnellement, de créer un groupe spécifique jeune, ce qui est très difficile à notre époque, en raison de la dispersion géographique croissante des familles. Mais dans tous les cas, qui méritent la reconnaissance des aînés, c’est pour faire « de la même chose », en modernisant les costumes, en ajoutant du rythme aux musiques, en affichant un dynamisme correspondant à leur âge. Au fond, on ne change rien, et on oublie l’importance de la culture dans sa diversité, le besoin d’accroitre ses savoirs, les possibilités de découvertes, le plaisir de dialoguer et de penser.

Il faut donc changer au fond, pas seulement dans les apparences, réorienter les finalités et les objectifs.

Voici les pistes principales de progrès possible, dans lesquelles les associations pourraient s’engager progressivement, sans lâcher ce qu’elles savent faire, mais en s’élevant.

  1. Dépasser l’entre-soi
  2. Elever le niveau culturel. La culture sous toutes ses formes
  3. S’engager dans les politiques culturelles et d’éducation populaire des collectivités territoriales et de l’Etat, donner du sens. Ajouter une fête polonaise à un calendrier des fêtes communal n’a aucun intérêt (sauf à mettre en évidence la différenciation qui pourrait d’ailleurs être considérée comme une forme de communautarisme, celui que l’on reproche aux autres), mettre un concert, une exposition, des conférences, un festival, un stage, la prestation de l’un de nos savants (historiens, scientifiques, diplomates) dans un programme culturel global, c’est autre chose. Et cela permet d’échapper à l’entre soi réducteur, et cela donne une autre image de la Polonia, comme partenaire culturel potentiel.
  4. Développer les partenariats, s’ouvrir et penser ensemble
  5. Rechercher des économies de moyens en faisant circuler expositions, concerts, conférences, dans le cadre d’une coopération entre associations, impulsée et coordonnée par une organisation supra locale. L’idée d’un conseil ou d’un collectif ou d’une fédération prendrait alors du sens. Actuellement un collectif ne sert à rien. l’exemple de celui des Hauts de France est malheureusement flagrant, il n’apporte rien aux associations, il n’impulse rien, il ne coordonne rien, il n’est pas un outil de communication commun digne de ce nom… Il pourrait le devenir s’il se réorientait complètement avec le soutien d’un groupe d’experts, d’un conseil scientifique, en lien avec l’université, avec l’ambassade et avec les institutions polonaises comme l’Institut Polonais de Paris ou la Bibliothèque Polonaise de Paris

Chacune de ces pistes pourra être développée à la fois dans le débat démocratique nécessaire et dans de prochains billets, si cela peut être utile.

L’absence d’impulsion organisée, de caution intellectuelle et morale, avec quelques personnalités charismatiques – il n’en manque pas dans la Polonia de France -  rend la tâche difficile.

Espérons encore. Le rayonnement de la culture polonaise ne peut pas s’éteindre.

Le 17 mars 2024

Pierre Frackowiak

 

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S
Janine Ponty a vu claire très tôt , en étant neutre de l'extérieur . Rien n'a changé .Au terme d'un siècle de présence en France , impossible de réunir la population descendante en groupe de valeur intellectuelle , toujours du rétropédalage entre-soi , toujours se croire mais jamais y être vraiment , incapacité de d'évoluer dans la perspective d'avenir , de l'autosatisfaction permanente toujours limité dans les frontières du Bassin Minier sans regard au delà , avec des orchestres chargées continuellement de maintenir le tassement des Ogorki dans le tonneau . Ce blog devient désespérant de participation , est-ce un devoir de déni de la vérité ? Les sujets toujours limités qu'à l'écriture viennent à manquer . Parler de la Pologne , très bien , mais laquelle "PIS" ou "TUSK" , Quelle est la version en France ? La Pologne est débarrassée de la domination communiste , la France seule en Europe conserve précieusement son parti coco avec sa fête de l'huma le tout subventionné par l'état . Combien y- a -t il de communes dans notre bassin minier des Hauts de France ? Quelle est la répartition des responsabilités communales ? paradoxe historique la dite Polonia aux 4ème , 5 et 6ème générations se portent bien sous la férule rouge avec des chefs de file aux noms slaves . Les messes du passé se font aujourd'hui dans les salles des fêtes municipales , les églises sont vides , les prêtres quand il y en a sont chargés d'une double mission nationale , et même les offices polonais se font en langue française .... . Et toujours on prétend être polonais . Non ce n'est pas l'avenir , il est derrière nous , même si on l' évoque par quelque moyen que ce soit mais en langue française . La communication aujourd'hui se fait sur les réseaux sociaux, les images sont plus percutantes que l écrit , la langue polonaise est celle des échanges . Qui a vu le 15 mars le reportage sur Facebook des Polonais Lillois et de la Métropole , et les Polonais ..... zapraszam ,? Là l'avenir de la Polonité est en marche avec ses enfants et son école polonaise . Mon travail en langue polonaise pour le Centenaire très admiré , est conservé en mémoire . Par contre ma très aimable proposition ( que je joins séparément ) reste malhonnêtement sans réponse par les " Pépé chantants " plus jeunes que moi , de Douai , qui ne sont ni mineurs ni polonais , très prétentieux mais avec un avenir en vérité très limité . Ma porte de sortie de ma propre "Polonia " se rapproche à grand pas , très satisfait de mon parcours malgré un siècle chargé de malheurs, de guère , de misère familiale, mais vivant quotidiennement comme un polonais , sans l'être réellement parmi ceux qui le sont VRAIMENT; <br /> Simon JUSKOWIAK
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